La
métamorphose du capitalisme, c'est à dire la fusion du capitalisme
de marché et du capitalisme d'état est une longue histoire...
Ce
qui importe ici est d'analyser la lente évolution de la pensée
économique pour adapter un système basé sur l'objet c'est à dire,
la production de marchandises. La production
(socialiste ou capitaliste) est donc devenue l'alpha et l'oméga des
économistes, et, le coeur de la pensée marxiste :
« La
production des idées, des représentations et de la conscience, est
d'abord directement et intimement mêlée à l'activité matérielle
et au commerce matériel des hommes: elle est le langage de la vie
réelle. »
Source : Marx : L'Idéologie allemande
Karl
Marx a passé sa vie à chercher et analyser les failles du
capitalisme avec un objectif qui ne peut que nous laisser perplexe
: « Les
philosophes n'ont fait qu'interpréter le monde de différentes
manières, ce qui importe c'est de le transformer. »
Tout
d'abord critiqué, diabolisé, les analyses de Karl Marx ont peu à
peu envahi la pensée économique. L'histoire lui a pourtant donné
tort. En effet, la révolution marxiste devait être la révolte des
travailleurs contre les « classes bourgeoises exploitantes »,
or, dans la Russie de 1917 (la Chine aussi plus tard), la « classe
bourgeoise » était quasiment inexistante. Paradoxe de
l'histoire, les révolutions « communistes » se sont
déroulées dans des pays très peu industrialisés, sans réelle
classe bourgeoise.
Cependant,
Karl Marx avait parfaitement identifié l'étape indispensable menant
au communisme : le socialisme. Il faut le rappeler, le communisme
prône l'abolition du travail salarié (plus de classes) et de
l'Etat, deux éléments clés du socialisme.
Le
socialisme était donc pour Marx une étape nécessaire permettant de
socialiser la production tout en conservant la forme du travail
salarié. Dans ce système, l'Etat joue donc un rôle clé et
organise un capitalisme centralisé. Les tentatives de mise en place
d'un état socialiste redistributif ont cependant échoué, et, n'ont
réussi qu'à accentuer les inégalités, à l'exemple de la Russie
et la Chine.
La Loi de Pareto s'applique
en effet partout et, dans les pays socialistes, la « nomenklatura »
s'est emparée du pouvoir en se transformant en classe exploitante.
L'écrivain
et prêtre français Félicité Robert de Lamennais qui publia Le Livre du peuple (pages 18-19) livrait, dès 1837, la quintessence du
rôle de l'Etat, une véritable prophétie d'une cruelle actualité
:
« Les
prolétaires, ainsi qu'on les nomme avec un superbe dédain,
affranchis individuellement, ont été en masse la propriété de
ceux qui règlent les relations entre les membres de la société, le
mouvement de l'industrie, les conditions du travail , son prix et la
répartition de ses fruits. Ce qu'il leur a plu d'ordonner, on
l'a nommé loi, et les lois n'ont été pour la plupart que des
mesures d'intérêt privé, des moyens d'augmenter et de perpétuer
la domination et les abus de la domination du petit nombre sur le
plus grand.
Tel est devenu le monde lorsque le lien de la
fraternité a été brisé. Le repos, l'opulence, tous les avantages
pour les uns; pour les autres la fatigue, la misère et une fosse au
bout. »
Cependant,
le capitalisme de marché est dans une situation aujourd'hui
critique, et, nombreux sont ceux qui croient au "grand soir »,
à la grande révolution communiste, dont le socialisme est l'étape
obligée. Pourtant, peu d'intellectuels ont véritablement compris
que le socialisme était un capitalisme d'état. La seule réelle
question étant en effet de savoir qui contrôle les capitaux, un
contrôle dans lequel l'état joue un rôle énorme, y compris dans
les économies de marché. On comprend mieux aujourd'hui pourquoi le
livre culte de Marx s'intitulait Le Capital, le coeur du
problème.
Karl
Marx est donc encore systématiquement étudié et influence
aujourd'hui l'ensemble des penseurs de l'économie.
Marx
était par exemple le plus fervent défenseur de la théorie
quantitative de la monnaie. Or, et je l'ai démontré à l'aide de la
fameuse loi de Fisher pour
consommer il faut équilibrer la masse monétaire avec la quantité
de marchandises. Une société consumériste (du latin consumere, qui
se consume) transforme en effet tout en exponentielles et en
particulier les marchandises, ainsi que la monnaie. La finance n'est
donc que le dernier avatar d'un système condamné à disparaître à
brève échéance.
Au
moment où le capitalisme s'effondre, les évènements s'accélèrent.
En effet, le capitalisme est en pleine métamorphose et pour
survivre, tente de résoudre ses contradictions en empruntant
systématiquement à celui qui les a compilées, Karl Marx.
L'analogie
des contraires n'est pas qu'un simple concept, c'est le coeur même
de tout mouvement de la pensée, de la psyché.
Le
marché applique ainsi aujourd'hui à merveille les théories dites
marxistes, mais dans un but inversé. Il faut en effet permettre la
hausse tendancielle du taux de profit, augmenter la production et
donc donner accès à la monnaie en grande quantité, ce qui
nécessite des taux très bas. Le coût de la monnaie est ainsi
devenu quasi nul pour les financiers, mais pas celui du travail, et
l'on a donc réussi à faire d'une pierre deux coups :
- l'inflation ne touche pas les détenteurs de grands capitaux.
- le coût du travail devra s'ajuster c'est à dire baisser à l'exemple des USA, de l'Irlande, de la Grèce et de l'Espagne, etc, etc. En France cela a commencé en 2010 pour les ouvriers et employés (secteur privé et semi-public) et ce n'est que le début...
Pour
mieux comprendre, il faut remonter le temps.
John
Maynard Keynes (1883-1946), en 1936, fut ainsi l'un des premiers à
expliquer que les marchés ne s'équilibraient pas sans intervention
de l'état (Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de
la monnaie).
Il
est d'ailleurs remarquable de noter que les théories de Keynes ont
été systématiquement mises en avant pour expliquer la sortie des
USA de la crise de 1929. Ceci est totalement erroné, et ce, pour
deux raisons :
- le New Deal a été une politique initiée en 1933 par Roosevelt, soit trois ans avant la théorie « révolutionnaire » de Keynes. Cette dernière fut d'ailleurs le fruit d'un travail collectif inspiré en grande partie par les travaux de Richard Ferdinand Kahn. Il a en effet démontré en 1931 à travers son étude : « The Relation of Home Investment to Unemployment » le lien entre investissement intérieur et chômage. De plus, Kahn insista sur l'importance de l'intervention de l'état pour lutter contre le chômage, le thème central de son étude « The financing of public works » publiée en 1932 (le mythe de Keynes décrypté bientôt).L'axe central de l'oeuvre de référence de Keynes publiée en 1936, la Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, repose ainsi sur les travaux de Kahn et de l'économiste suédois Knut Wicksell qui prônaient l'intervention de l'État dans l'économie. Parler de la politique Keynésienne de Roosevelt est un non sens historique et Keynes n'a d'ailleurs fait que compiler les travaux du cercle d'économistes nommé The Cambridge Circus.Roosevelt n'avait d'ailleurs jamais entendu parler de Keynes lorsqu'il instaura le New Deal. Il ne rencontra Keynes que le 28 mai 1934 et l'entrevue se passa très mal.Encore un mythe qui s'effondre aujourd'hui (Le larousse doit réviser sa copie). Cela fait étrangement penser à Walter Lippman, un « grand » journaliste américain et ami de Keynes qui décrivait la « fabrique du consentement » dans son oeuvre culte Public Opinion (1922) : « pour mener à bien une propagande, il doit y avoir une barrière entre le public et les évènements. »
Avec Keynes, on a surtout construit un mythe dans le but de justifier
l'intervention de l'état. Keynes fut d'ailleurs un des premiers à
utiliser les mathématiques afin d'appuyer ses théories. Wittgenstein
expliquait dans son Tractatus que : « les lois logiques sont des
tautologies, elles ne disent rien sur le monde ». La tautologie étant
une proposition tournée de manière à ce que sa formulation ne puisse
être que vraie, nous comprenons mieux pourquoi les économistes utilisent
tant les mathématiques.
Le mathématicien Kurt Gödel (1906-1978)
est ainsi devenu célèbre avec son théorème d'incomplétude qui démontre
les limites de notre compréhension du monde. Plus passionnant encore et
surtout méconnu, son théorème d'inconsistance développe le fait qu'une
démonstration mathématique peut servir à expliquer tout et son
contraire.
Les travaux de Gödel nous enseignent que l'homme (et sa prétention de connaissance) tourne en rond autour de lui-même.
Marx
révélait d'ailleurs le fameux pot aux roses (que nos « grands »
intellectuels connaissent parfaitement) dans une lettre à
Friedrich Engels (15 août 1857) qui est très peu
diffusée :
« Il est possible que je me
sois mis dans l’embarras. Mais avec un peu de dialectique, on s’en
tirera toujours. J’ai naturellement donné à mes
considérations une forme telle qu’en cas d’erreur, j’aurais
encore raison. »
Mais
revenons à nos moutons...
L'économiste
Joseph Schumpeter, dès 1942, dans son ouvrage Capitalisme,
socialisme et démocratie, développa
l'analyse imputée à Keynes et affirma l'importance des travaux de
Marx. C'est en 1954 qu'il réouvrit la boîte de Pandore en
expliquant :« Marx fut l’un des
premiers à tenter d’élaborer un modèle explicite du procès
capitaliste. »
Il
expliquait :
« L’évolution
capitaliste n’aboutit pas seulement à un vide qui pourrait être
indifféremment comblé par n’importe quel matériau : les
hommes et les institutions sont, chemin faisant, transformés dans
des conditions qui les séparent toujours davantage aux modalités
socialistes. Chaque fois que la charpente capitaliste perd un de ses
étançons, un obstacle au plan socialiste disparaît simultanément.
À ces deux égards, la vision de Marx était juste. Nous pouvons
donc nous y rallier en associant la transformation sociale spécifique
qui se poursuit sous nos yeux avec l’évolution économique qui en
est le moteur initial » (Schumpeter, 1979, p. 220).
Nous
connaissons aujourd'hui la suite. De nombreux économistes ont donc
étudié les problèmes économiques sous l'angle marxiste, afin,
bien sûr, d'y apporter des solutions dans lesquelles l'état joue,
bien sûr, un rôle clé. Il est remarquable de noter qu'un mouvement
symétrique inversé s'opérait en Chine, un bel exemple d'union des
contraires.
Ainsi,
le Parti communiste chinois fit un virage à 360 degrés en avouant
ce que préconisait Schumpeter : « Le plan et le marché sont
des moyens de régulation économique indispensables dans l'étape du
développement de l'économie marchande sur la base de la grande
production de socialisation. »
Source : French.china.org.
Pour
comprendre la fusion en cours, il convient d'étudier les
fondamentaux du capitalisme et surtout son premier credo qui relève
de la foi la plus mystique : la concurrence pure et parfaite.
Comme
je l'ai déjà écrit, cette loi est au coeur de la théorie de
l'équilibre général, le pilier de la pensée économique du
capitalisme de marché.
La
science économique a d'ailleurs passé son temps (en vain) pour
tenter de justifier ce que le moindre commerçant sait depuis
toujours, c'est à dire que la concurrence pure et parfaite n'existe
pas. Il suffit de demander aux représentants des diverses mafias
(triades, etc) pour qu'ils expliquent que la concurrence pure et
parfaite possède un médiateur très persuasif : un révolver.
Le
livre Gomorra de Robert Saviano (2007) illustre à merveille
l'inanité d'un tel paradigme qui est , rappelons-le, un des piliers
du capitalisme.
Cependant,
il ne faut pas trop vite enterrer un système dont la quintessence
est basée sur la compréhension profonde de l'homme : l'équilibre
par la confrontation des désirs de puissance, du « mal »
par le « mal », la concurrence.
Adam
Smith résumait parfaitement cette idée :
« C'est
dans le conflit des forces opposées que la science cherche l'ordre
et l'équilibre : la guerre perpétuelle est selon elle le seul moyen
d'obtenir la paix ; cette guerre s'appelle la concurrence.
»
Notre
système économique, et c'est le grand secret des fractales, n'est
que le reflet de ce que nous sommes.
Donc,
Léon Walras, dans son ouvrage : élément
d'économie pure
(1877), développa ce postulat de base du capitalisme : « le
système des prix au sein d'un système décentralisé et
concurrentiel permet l'équilibre économique général ».
Or, on oublie trop souvent que cela exige de maintenir les conditions
de la concurrence.
Pour
l'économiste et mathématicien japonais Morishima (1923-2004),
l'équilibre général n'était possible qu'à condition que l'Etat
intervienne.
Il
associa ainsi Marx et Walras dans ses recherches et participa au
développement du Toyotisme.
Professeur
à Oxford, Yale et surtout à la prestigieuse London School of
Economics, son influence fut énorme dans les années soixante-dix au
Japon. Il faut tout de même rappeler que la London School of
Economics fut fondée en 1895 par George
Bernard Shaw, Graham Wallas, Beatrice et Sidney Webb, tous membres
exécutifs de la très socialiste Fabian Society.
Source
: London School of Economics
L'amélioration
continue, le célèbre Kaisen, et l'endoctrinement devinrent les
bases de l'industrie japonaise avec le succès que l'on connait.
Morishima, vers la fin de sa vie, prédisit malgré tout
l'effondrement total d'un système basé sur l'augmentation
permanente (les exponentielles) de la production.
Force
est de constater l'incapacité totale de la science économique à
maîtriser quoi que ce soit.
En
France, face aux critiques de plus en plus nombreuses du modèle de
Walras, Gérard Debreu en collaboration avec Kenneth Arrow publia en
1954 une contribution « exceptionnelle », intitulée
Existence of an Equilibrium for a Competitive Economy qui
était sensée prouver l'existence d'un équilibre général en
économie de marché.
Lorsque
la crise monétaire fit rage (fin des accords de Bretton Woods en
1971), faisant voler en éclat la loi de l'équilibre général,
Debreu «
adapta » ses travaux et le
théorème de Sonnenschein-Mantel-Debreu apparut (1972-1974). Il
démontrait qu'il n'y avait pas d'équilibre général unique et
stable et surtout qu'il fallait coodonner les acteurs économiques
afin de fixer les prix, rôle dévolu à l'état, un magnifique
exercice de contorsionniste et, surtout, un bel exemple d'application
du théorème d'inconsistance de Gödel.
L'économie centralisée planifiée
unifiant le marché et l'état, le seul modèle efficace pour
beaucoup, reposait désormais sur une « solide » base
théorique.
Face à tant de « génie »
et une telle « prouesse », Debreu reçut en 1983, le
« prix Nobel » d'économie.
Pour
démontrer l'importance du problème de la fixation des prix, il faut
souligner que l'article 105 alinéa 1 du Système européen des
banques centrales (SEBC) déclare que « L'objectif
principal du SEBC est de maintenir la stabilité des prix. »
Source : BCE
L'obsession
est en effet de ne mettre aucun frein aux saints sacrements, acheter
et vendre mais surtout, produire et consommer, les « deux
fonctions essentielles de l'homme »
pour Ricardo, le mentor économique de Marx.
Marx,
plus subtil et secret que l'on ne pense avait d'ailleurs parfaitement
compris les implications d'un tel idéal : « L'aspect
de la monnaie ne trahissant point ce qui a été transformé en elle,
tout, marchandise ou non, se transforme en monnaie. Rien qui ne
devienne vénal, qui ne se fasse vendre et acheter ! La circulation
devient la grande cornue sociale où tout se précipite pour en
sortir transformé en cristal monnaie. Rien ne résiste à cette
alchimie, pas même les os des saints et encore moins des choses
sacro-saintes, plus délicates, res sacrosanctoe, extra commercium
hominum.»
Mais
revenons de nouveau à nos moutons...
Pour
recevoir un « prix Nobel » d'économie, il y a 3 règles :
- identifier un dysfonctionnement de l'économie de marché.
- démontrer que l'intervention d'un organisme de régulation le résoudra.
- utiliser les mathématiques (théorême d'inconsistance) pour transformer le tout en tautologie et, abracadabra ! (ou plutôt Emstrang Gram Bigà bigà ic calle Gram...).
Le
« prix Nobel » d'économie 2012 a donc été attribué à Loyd
Shapley et Alvin Roth.
Ils
ont ainsi démontré, à l'aide des mathématiques, qu'une économie
de marché efficace, c'est à dire permettant l'ajustement de l'offre
et de la demande, impliquait un capitalisme de marché centralisé et
planifié. Deux « grands » économistes qui ont tout
compris.
Cependant,
l'essentiel n'est pas là.
En
effet, Léon Walras dans son ouvrage Éléments
d’économie politique pure, ou
théorie de la richesse sociale (1874)
révélait le grand secret de l'économie :
« A
l'état d'équilibre de la production, les entrepreneurs ne font ni
bénéfice ni perte. »
Cette
petite phrase, d'apparence anodine, est nettement plus
« révolutionnaire » que la baisse tendancielle du taux
de profit (qui est fausse).
Cette
loi, implique en effet que l'équilibre général soit contrôlé de
façon à générer le fameux bénéfice, d'où l'intérêt des
producteurs de fixer eux-même les règles, et pour cela, rien ne
vaut l'état.
On
comprend mieux ainsi l'importance de la régulation.
Michel
Aglietta a publié en 1976 le livre fondateur « régulation
et crise et capitalisme » fille
de la théorie du Capitalisme monopolistique d’État (CME) dans
laquelle, selon Herzog
et Boccara, les
appareils étatiques sont mis au service de l'économie afin de
limiter la baisse tendancielle du taux de profit pour les capitaux et
l'initiative privés. L'état doit donc intervenir en prenant comme
postulat une théorie totalement fausse (la baisse tendancielle du
taux de profit) tout en masquant la pensée de Walras et ses
implications. L'état est en effet obligé d'intervenir (fixer les
prix et réguler le secteur bancaire) pour qu'un petit nombre
« d'élus » puissent continuer à s'enrichir.
Pour approfondir : Nouveau capitalisme
L'idée
d'une régulation de l'économie par l'état est vieille comme le
monde et les économistes ultralibéraux n'y échappent pas.
Dans
Capitalism and Freedom (1962,
chap. 1, p. 15), Milton Friedman indiquait que
« l'existence d'un marché libre
n'élimine évidemment pas le besoin de gouvernement. Au contraire,
le gouvernement est essentiel, à la fois pour déterminer les
« règles du jeu », et comme arbitre, pour interpréter
et faire respecter les règles qui ont été adoptées. »
Chomsky
détruit d'ailleurs régulièrement le mythe du pur capitalisme de
marché sans intervention étatique.
Keynes
expliquait d'ailleurs que le contrôle bancaire (la fameuse
régulation) serait mondial : « L'idée
qui sous-tend ma proposition pour une Union Monétaire est simple, à
savoir généraliser le principe essentiel du secteur bancaire... par
l'établissement d'une Banque de Règlement internationale.
»
Cette
idée reprend pour l'essentiel les idées de Marx :
« C'est dans le commerce entre nations que la valeur des marchandises se réalise universellement. C'est là aussi que leur figurevaleur leur fait vis-à-vis, sous l'aspect de monnaie universelle monnaie du monde (money of the world), comme l'appelle James Steuart, monnaie de la grande république commerçante, comme disait après lui Adam Smith. C'est sur le marché du monde et là seulement que la monnaie fonctionne dans toute la force du terme, comme la marchandise dont la forme naturelle est en même temps l'incarnation sociale du travail humain en général. »
« C'est dans le commerce entre nations que la valeur des marchandises se réalise universellement. C'est là aussi que leur figurevaleur leur fait vis-à-vis, sous l'aspect de monnaie universelle monnaie du monde (money of the world), comme l'appelle James Steuart, monnaie de la grande république commerçante, comme disait après lui Adam Smith. C'est sur le marché du monde et là seulement que la monnaie fonctionne dans toute la force du terme, comme la marchandise dont la forme naturelle est en même temps l'incarnation sociale du travail humain en général. »
Le
capitalisme, en pleine métamorphose, toujours en quête de nouveaux
marchés et désirant désormais se « moraliser » a
trouvé un nouveau prophète, l'économiste Jeremy Rifkin. Celui-ci
veut donc quitter la révolution industrielle basée sur les énergies
fossiles qui sont en train de mourir et se tourner vers ce qu’il
appelle « l’énergie distribuée » (par les grandes
multinationales), une variante de la multiplication des pains, mais
contre espèces sonnantes et trébuchantes.
La
nouvelle économie « le capitalisme vert » sera le
parfait exemple d'intégration des marchés et de l'état car rien ne
justifie plus la régulation (mondiale) que l'écologie. L'état taxe
et construit les infrastructures, le marché distribue et ramasse la
mise. Socialisation des investissements et pertes, privatisation des
profits, une merveilleuse vision de l'avenir qui se met en place
mondialement.
Par
exemple, le portugal a vendu ses aéroports au groupe Vinci, la Grèce brade tout (réseau électrique, ports, autoroutes, etc).
Le
peuple nage dans le bonheur, ses impôts, la socialisation des coûts
initiaux qui ont servi à financer ses infrastructures, vont
bénéficier à de grandes multinationales.
Pas
étonnant que l'ancien premier ministre grec (2009-11/11/11) Georges
Papandréou, président de l'Internationale Socialiste, soit devenu
enseignant à Harvard en tant que spécialiste de la crise. Son père
Andréas Papandréou a d'ailleurs été premier ministre grec de 1981
à 1989 puis de 1993 à 1996. Le « contrôle »
démocratique est désormais devenu héréditaire...
Source : Papandréou à Harvard
Alexis
de Tocqueville (1805-1859), visionnaire, dénonçait « le despotisme
démocratique »
qu'engendrait la planification économique et déclarait par
ailleurs : « Les Français veulent
l'égalité, et quand ils ne la trouvent pas dans la liberté, ils la
souhaitent dans l'esclavage... La liberté n’existe pas sans
morale, ni la morale sans foi. »
Alberto
Alesina directeur du département d'économie d'Harvard (2003-2006)
expliquait ainsi dans son ouvrage publié en 2006 (The future of
Europe, Reform or Decline) que
le modèle social européen était sur le déclin. A force de
rationalité et de matérialisme, toute humanité disparaît...
Avec
la crise, l'intervention de l'état devient la règle et, par
exemple, aux USA, de nombreuses villes sont administrées par
celui-ci.
Détroit
a ainsi été mise sous tutelle en mars 2013 avec un administrateur
et coordinateur exceptionnel (Kevyn Orr) qui possède
les pleins pouvoirs et n'a plus besoin de soumettre ses décisions au
conseil municipal. La démocratie locale est en voie de disparition
aux USA !
Source : Detroit mise sous tutelle
Malgré
tout ce « génie » déployé, la dernière tentative de
survie de la pensée matérialiste est vouée à l'échec.
Notre
système économique fonctionne en effet selon le triptyque : dette =
consommation = travail qui ne génère que des exponentielles.
Comme
je l'ai déjà écrit, l'intégrisme marchand a le don d'ubiquité
et, l'obsession de la production de quantité du capitalisme a donc
été inversée et remplacée par l'obsession de la quantité de
production socialiste.
Les
capitalismes de marché et d'état fonctionnent ainsi sur le même
mode de pensée cartésien et matérialiste qui place l'objet et sa
production au coeur du système. La contrepartie consiste à
augmenter encore et toujours la quantité de monnaie, sa masse et sa
vitesse, le vrai rôle de la finance.
En
effet, une vision cartésienne et matérialiste finit par engendrer
son corollaire, le culte de l'objet, de la marchandise et nous sombrons dans les affres de l'inconscient, c'est à dire de celui
qui a perdu toute conscience. In fine, celui qui fixe réellement les
prix, n'est pas l'Etat, mais notre inconscient, facilement
manipulable. Le fétichisme de l'objet et son corollaire, le culte de
la quantité, ont remplacé dieu, un monde dans lequel l'homme
ne rencontre désormais que lui-même.
Freud
est donc celui qui permettra, après Marx, de résoudre l'énigme de
la valeur des marchandises. On comprend mieux ainsi en quoi Freud est
le prolongement logique de Comte, Feuerbach et Marx, la lente
descente dans les profondeurs, le mythe d'Orphée revisité.
L'égocentrisme,
l'hédoniste et le narcissisme âprement combattus depuis l'aube de
l'humanité sont aujourd'hui encensés, au coeur de la publicité et
de l'étude de la valeur des objets. Danielle Allérès, économiste
à la Sorbonne, responsable du Centre de Recherches luxe et Art
expliquait ainsi qu'« un objet, un produit ou un service de
luxe traduit toute l’amplitude des opportunités de choix d’un
produit. Il répond, tout à la fois, à des facteurs rationnels de
sélection d’objets ou de produits (revenu de l’acquéreur, prix
des produits, rapport qualité-prix, ...) et à des facteurs
irrationnels (satisfaction personnelle de nature hédoniste,
narcissique, égocentrique, ...).
Source : valeur des objets
Peut-être
un jour nous rendrons-nous compte que ce qui a un prix n'a que peu de
valeur, mais ceci est une autre histoire...
Ainsi, comme le résumait fort bien
Giuseppe Tomasi di Lampedusa, « Il
faut que tout change pour que rien ne change. »
La domination de
l'homme par l'homme est donc au coeur de l'économie quel que soit le
« système » utilisé, ce qu'illustrait à merveille
Thrasymaque, un sophiste de la Grèce antique du Vème siècle av
J.C. Dans la
République, Thrasymaque révèlait
ainsi la quintessence de l'économie politique et de la métamorphose
en cours du capitalisme : « la
justice naturelle est ce qui est le plus avantageux au plus fort ;
et le plus fort est celui qui ne se trompe pas dans la compréhension
de ce qui lui est avantageux. Le but de tous les hommes, ce qui rend
vraiment heureux, c'est de mettre la puissance aux services des
passions et des intérêts de celui qui la possède. L'injustice est
sage et vertueuse. »